Un des objectifs affichés par le Plan de Gestion Anguille réside dans l’estimation de l’efficacité des stations de comptages. L’historique des suivis réalisés à la passe-piège d’Abbeville nous permet de dire que le piégeage est partiel. En plus du fonctionnement direct du piège évoqué ci-dessus, la diversité des voies de passages peut permettre à une quantité non négligeable d’individus de contourner le dispositif de comptage. Dans cet optique, en plus des pêches électriques, un suivi par piégeage passif avec des « flottang » permettant la capture de jeunes stades d’anguilles a été réalisé autour de l’ouvrage de Saint-Valéry-sur-Somme en 2019 et sur la maille d'Abbeville en 2020.
Localisation
L’objectif de l'étude 2019 a été d’observer les différences de colonisation des civelles entre les axes Somme et contre-fossé/Amboise et permet d’estimer grossièrement si la quantité d’anguilles ne transitant pas par le fleuve Somme est importante. Dans cet optique la méthode de piégeage avait été testée en juillet 2018 dans la maille d’Abbeville autour du barrage des Six Moulins.
Le suivi 2020 avait pour objectif d'observer la colonisation des individus sur les affluents de la Somme sur ce secteur : Scardon, Doit, Nonnains, Novion et contre-fossé. En parallèle, l’emplacement des pièges permet aussi d’évaluer si les différents ouvrages présents sur les linéaires d’étude ont un impact sur la remontée des jeunes stades d’anguilles.
Le dispositif
Les flottangs sont constitués d’un empilement de 10 carrés de géotextiles (50x50 cm), maintenus par des colliers de serrage équipés de flotteurs. L’ensemble fait office d’habitat artificiel apprécié par les jeunes anguilles qui viennent se glisser dans les mailles des différentes couches du treillis très structuré. Il peut être disposé en berge ou en chenal. Cet outil a été développé en 2014 par le Groupement des Fédérations de Pêche de Poitou-Charentes.
Cette technique présente plusieurs avantages : Elle est sélective vis-à-vis des jeunes anguilles (< 12cm), elle est relativement simple, peu coûteuse et facilement déployable. L’équipe nécessaire est restreinte pour la mise en place et pour les relevés (bien inférieure à celle d’une pêche électrique classique). La disposition des engins peut être faite dans des zones non prospectables à l’électricité (milieu trop profond, salinité trop importante, accès impossible, marais, etc…).
Les résultats
Les flottangs sont mis en place mi mai durant les premiers pics de migrations des civelles et des anguillettes, et sont relevés par les techniciens de la fédération à raison de trois fois par semaine. Une fois les pièges remontés, les carrés de géotextile sont examinés afin de capturer les individus qui s'y étaient abrités. Une biométrie complète (taille, poid, pathologie) est effectuée, avant la remise à l'eau de ces derniers.
En 2019, 513 individus ont été capturés dont 184 civelles (soit 36% des captures). Ce suivi a ainsi permis de mettre en évidence la présence d’une population migrante non négligeable sur le contre-fossé et l’un de ses affluents, l’Amboise. Il constitue donc une voie de passage supplémentaire pour les civelles arrivant au pied de l’ouvrage de Saint-Valéry-sur-Somme. En 2020, 210 individus ont été capturé mais très peu de civelle ont été inventoriée du fait notamment de la distance des pièges de la mer, ces dernières déjà considérées comme anguillette (pigmentation présente). Ces données montrent qu'il existe une part importante de la population transitant sur plusieurs voies de passage autre que le canal de la Somme, et ne sont donc pas inventoriées à la passe piège d'Abbeville.